Gillmore JD et al., New Engl J Med 2021
https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMoa2107454?query=featured_home
Introduction
L’amylose héréditaire à transthyrétine (AHTTR) est une maladie autosomique dominante grave résultant de mutations sur le gène TTR qui provoquent l’accumulation d’une protéine TTR anormale notamment dans les nerfs périphériques et le cœur. Plusieurs traitements sont disponibles, y compris des molécules ciblant spécifiquement l’ARNm TTR dans le foie, organe synthétisant l’essentiel de la protéine TTR.
Récemment, des techniques de manipulation génétique de type CRISPR-Cas9 ont été développées qui permettent l’excision sélective d’un gène in vivo. Dans le contexte de l’AHTTR, CRISPR-Cas9 semble un outil théoriquement adapté pour déléter sélectivement le gène TTR muté. Des études préliminaires menées chez la souris et le singe ont montré que le ciblage spécifique du gène TTR dans le foie avec le système CRISPR-Cas9 permet une excision quasi-complète du gène TTR et une réduction >95% du taux de TTR circulante. Aucun effet « hors-cible » génétique n’a été identifié dans le foie et dans d’autres tissus, y compris par analyse génétique NGS exhaustive et par simulation informatique. Par ailleurs, les études de régénérescence hépatique post-chirurgicale ont montré que cette délétion génétique hépatique était définitive.
Résultats
Dans cette étude, les auteurs ont utilisé la technique CRISPR-Cas9, qui permet la manipulation in vivo du génome, pour exciser le gène TTR dans le foie de 6 patients avec une AHTTR.
- Injection par voie IV (1 seule injection) des nanoparticules lipidiques contenant un ARN de guidage (sgRNA) spécifique de TTR et un ARNm Cas9.
- Réduction du taux de TTR sérique de plus de 90% à la dose de 3 mg/kg (courbe rouge) par rapport à un sujet sain (courbe noire).
- Aucun effet secondaire significatif observé. Une supplémentation par vitamine A était néanmoins nécessaire en l’absence de TTR, molécule de transport habituelle de la vitamine A.
- Suivi prévu des 6 patients inclus dans cette étude sur le long cours et des études de phase II/III ne tarderont pas à être débutées.
Si ces résultats se confirment, certaines maladies génétiques pourraient à l’avenir être traitées de manière définitive avec 1 seule injection IV d’un correcteur génétique (« one shot genetic treatment»).
Conclusion
Ces résultats prouvent qu’une excision génétique sélective à visée thérapeutique est possible chez l’homme. Maintenant que la preuve de concept est faite, cette technologie de traitement génétique « correcteur » va très probablement être appliquée à d’autres maladies génétiques que l’AHTTR.